GABE « GUERILLA GARDENING FRANCE »


Enregistrement : 17/09/13

Guerilla-Gardening-France.fr fait figure de site incontournable pour les guérilleros de l'Hexagone. Rendez-vous, carte des actions passées ou futures, historique du mouvement, il reste l'une des principales portes d'entrée et références pour tous ceux qui voudraient s'essayer à la guérilla jardinière au sein de nos frontières géographiques ou linguistiques.

Nous avons contacté Gabe, le chef de file du mouvement, basé à Paris, qui a accepté de répondre aux questions de La Spirale.


Propos recueillis par Soizic Sanson.

Autres contenus de ce dossier consacré à la guérilla jardinière :

. Introduction à la guerilla gardening
. Interview et galerie de Vanessa Harden



Guerilla Gardening France par Naeqo

Vous semblez être l'un des têtes de file de la guérilla jardinière en France. Pouvez-vous vous présenter et nous raconter quel a été votre parcours personnel, pour en arriver à vos premières actions ?

Je m'appelle Gaby, on me surnomme Gabe ou Gabeu, j'ai 26 ans et depuis 2009 je pratique la guerilla gardening. Plusieurs raisons m'y ont amené.

Premièrement, j'ai toujours apprécié jardiner. J'ai une formation de jardinier et d'ingénieur paysagiste et la GG m'a permis de pratiquer, d'expérimenter et de m'épanouir dans ce métier. Malgré cela, une formation, comme son nom l'indique, formate : plutôt que de vendre un aménagement je voulais pratiquer le jardinage avec les autres. Plutôt que de faire un jardin conventionnel, je voulais expérimenter de nouvelles formes de jardinage et ce dans l'espace public plutôt que privé... Ensuite, j'ai toujours eu le sentiment que l'espace public nous appartenait de moins en moins. Comme si les agents de sécurité, les agents d'entretien et les encadrants culturels n'étaient plus que les seuls à pouvoir faire vivre l'espace public alors qu'il appartient à chacun de nous et qu'il fait partie intégrante de notre environnement. C'est avec cet état d'esprit que j'ai commencé à participer à des actions d'anti-pub contre l'accaparement de l'espace public visuel ; j'ai fait des vélorutions contre une ville aménagée uniquement pour la bonne circulation des voitures ; et quelques d'autres actions directes. Rapidement, j'ai réalisé que les plantes jouent un rôle essentiel dans de nombreuses disciplines (l'alimentation, la pollution, l'environnement, la solidarité, l'économie, ...) et qu'elles permettent de réaliser des actions concrètes, au contraire des manifestations traditionnelles...

Enfin, n'ayant pas de jardin, il me fallait un lieu pour jardiner et expérimenter. Quoi de mieux que ce grand terrain de jeu qu'est l'espace public ? C'est ainsi, avec l'envie de jardiner et d'expérimenter le jardinage urbain, l'envie d'améliorer mon environnement et de faire des actions concrètes de contestation que je me suis mis à la GG.

Comment définiriez-vous la guerilla gardening ? C'est un mouvement dense, politique, économique et écologique. Qu'est-ce qui prend le plus de sens pour vous dans cet activisme, dans le contexte actuel ?

La guerilla gardening, c'est effectivement énormément d'inspirations à la fois et c'est ce qui en fait un mouvement très intéressant à mon sens. Tout d'abord, c'est un mouvement et non pas un groupuscule organisé ou administré. Partout dans le monde, des individus jardinent sans autorisation, mais toujours avec un objectif personnel qui participe au mouvement. Je ne pense pas qu'il y ait une forme d'action qui comporte plus de sens qu'une autre. Que ce soit pour cultiver et pour nourrir sa famille, que ce soit pour avoir la sensation de faire quelque chose d'utile et de s'épanouir, ou que ce soit pour rendre son coin de rue plus attrayant : chacun y trouve un sens qui lui est propre.

Personnellement, je trouve que les actions de GG les plus fortes sont celles qui portent un message. Que ce soit des gens qui plantent des arbres en signe de contestation sur le tracé d'un futur projet routier, que ce soit un jardinier qui fasse pousser du lierre sur un panneau de publicité pour ne plus avoir à le subir, que ce soit des habitants qui ne veulent pas voir les derniers hectares de terre maraîchère d'Île-de-France grignotés par des zones pavillonnaires - et qui en conséquence y cultivent malgré l'interdiction ; voici des exemples d'actions activistes qui ont de la valeur dans le contexte actuel.

Vous résidez à Paris et y réalisez diverses actions au sein du mouvement. De manière générale, comment s'organisent les actions à l'échelle collective, dans la capitale ? Connaissez-vous les activités des autres groupes français ou au-delà des frontières hexagonales ? Au moins via le forum des guérilleros parisiens, d'après mes pérégrinations sur la toile ?

Oui, je réside à Paris désormais. Les actions s'organisent assez souvent de manière informelle, entre noyaux de guérilleros habitués, du jour au lendemain par un échange sur notre groupe Facebook ou par le forum. Ce dernier est de moins en moins utilisé car nous échangeons désormais directement entre nous, les nouveaux venus les plus motivés échangent leurs numéros ou leurs emails et tout est plus intuitif. Nous choisissons un lieu de rendez-vous, nous voyons ce que nous avons en stock comme plantes, si il faut en récupérer, en acheter ou en faire pousser et nous passons à l'action. Il existe aussi une carte interactive et participative où chacun peut partager ses actions, les lieux qu'il a repérés pour de futures actions, etc. Ensuite, sur le site internet figure un agenda et une newsletter au travers desquels je préviens autant que possible des futures actions « publiques » à Paris et ailleurs quand on m'en tient informé. Les actions publiques ont lieu en moyenne une fois par mois, pour des évènements internationaux (GG tournesol, Parking day, GG Tulipe...) ou des initiatives individuelles. Ces actions publiques sont moins nombreuses, car elles demandent de l'organisation, de prévoir des plantes pour chacun, des alternatives en cas d'imprévus, des outils, de l'eau, etc. Les actions publiques permettent à de nouvelles personne d'y participer mais nous en limitons la fréquence pour garder une certaine spontanéité, pour rester un peu discret et pour éviter d'avoir trop de médias ou la police sur le dos... :)

Je suis en relation avec Richard Reynolds, une GG en italie, une en Belgique et parfois à l'autre bout du monde pour échanger sur des techniques, pour rencontrer certains d'eux de passage par la France. C'est un vrai plaisir et un enrichissement très fort qui se crée grâce à cette activité universelle qu'est le jardinage. En France, je suis en bons termes avec la GG Lyon, nous nous voyons au moins une fois par an, nous échangeons et nous faisons même des actions ensemble ! De manière plus générale, je suis les GG à travers toute la France et je suis de près leurs activités.

A tous ceux qui seraient tentés de rejoindre le mouvement, à Paris ou ailleurs, comment peuvent-ils se manifester ? Avez-vous des attentes particulières après quelques années de pratique ?

Aujourd'hui, le meilleur moyen de se manifester reste le groupe Facebook. Plus consulté que les forums, il permet aux gens de se retrouver rapidement et d'échanger facilement. De mon côté, je rassemble un maximum de contacts répartis sur toute la France et je les transmets aux futurs guérilleros intéressés. Une partie de ces contacts est sur le site dans la rubrique « actions » (à mettre à jour) : en cliquant sur la région de leur choix, on peut voir s'il y a des contacts. Pas d'attentes particulières, juste que les gens n'hésitent pas à se manifester et à me relancer si je ne réponds pas immédiatement.

Comment avez-vous vécu l'évolution de la guerilla gardening au fil du temps et quel avenir souhaitez-vous / voyez-vous à cet activisme et à votre propre pratique de la guérilla ?

La GG évolue de manière aléatoire, selon les individus présents, selon les saisons, selon le temps que je peux y consacrer et selon les sujets d'actualité. Je vois de plus en plus de gens motivés et enchantés de passer à l'action concrète par la GG. Des personnes d'horizons très différents se croisent, échangent et participent au mouvement. Nos actions sont de plus en plus routinières, rapides à mettre en place qu'au début, mais il reste beaucoup à apprendre pour que chaque action soit une réussite, pour inventer toutes les techniques de jardinage urbain... Je souhaiterais pouvoir y consacrer plus d'énergie, mener d'avantage d'actions d'envergure, organiser une rencontre entre les GG d'Europe, écrire un livre sur notre retour d'expérience, mettre à jour le site internet, etc.

En bref, l'avenir de la GG est plein de projets que j'espère voir se réaliser. J'espère aussi que le mouvement n'aura un jour plus de raison d'être, que chacun pourra jardiner où bon lui semble sans que son geste soit perçu comme du vandalisme ou de la dégradation. Mais tant qu'il restera des projets inutiles ou des pratiques à contester, les actions de GG auront lieu d'être. Je souhaite que le mouvement s'amplifie et que le fait de jardiner en bas de chez soi dans l'espace public devienne un réflexe.


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