JEAN-CHARLES TRAMASURE « DIGITAL CIRCUS »


Enregistrement : Archives de La Spirale (1996-2008)

Musicien électronique belge proche de Front 242 durant les 80's et initiateur de labels chez Play It Again Sam au début des années 90, DJ résident du mythique Boccacio, co-créateur d'ArKaos, le logiciel de référence des VJ's, visual & light designer pour Jean-Michel Jarre, David Bowie ou Basement Jaxx et consultant dans le domaine des nouvelles technologies de l'image et du son, Jean-Charles Tramasure fait partie de ces créateurs ignorés du grand public dont l'oeuvre influence pourtant jusqu'à notre quotidien.

Aujourd'hui relocalisé à Genève, il poursuit sur sa trajectoire futuriste et prospective avec le Digital Circus, un projet de spectacle total et architectural basé sur la synchronisation de la musique électronique, de projections vidéo d'une dimension et d'un genre nouveaux, et de performances live en interaction avec le public. Bienvenue dans un 21ème siècle créatif et délirant !


Propos recueillis par Laurent Courau.


Raconte-nous tes débuts dans les méandres de la culture électronique. Il y a eu le projet Shift dans les années 80 et déjà des collaborations avec le groupe Front 242?

Dès la sortie de la carte d'extension MIDI sur le Commodore 64, j'ai commencé à faire de la musique electro minimaliste et atmosphérique avec le Pro 16 de Steinberg. Mon premier morceau s'appelait Jessie Deep, un titre qui est devenu mon pseudonyme par la suite. Avec Vincent Vanderbecken (Hank Barrett), nous avons formé Shift, un groupe concept qui tentait de déchiffrer les tendances gothiques électro-body qui planaient à cette époque en Belgique. J'ai ensuite produit un EP concept et un clip vidéo en édition limitée qui ont très bien fonctionné dans les clubs spécialisés. Tout naturellement, nous nous sommes retrouvés dans le mythique studio d'Art & Strategy (le studio de Front242) à Aarschot. Daniel Bressanutti et Patrick Codenys sont très vite devenus des amis et ils nous ont donné de bons coups de pouce pour promouvoir nos délires sur la scène industrielle de l'époque, jusqu'à nous aider à réitérer l'aventure sur le label allemand Zoth Ommog de Talla 2XLC.Nous sommes restés proches jusqu'à mon départ pour la Suisse en 2000.

En 1992, j'ai installé mes quartiers dans le Studio Sound Factory de Thierry Beaucarne à Charleroi pour élaborer mes nouvelles expérimentations sonores. Avec Frank Beekman, nous avons créés deux labels chez PIAS (R&D Records, WafWaf Records) avec de nombreuses découvertes dans l'underground.

Tu as ensuite emboîté le pas à la déferlante Nu Beat et House Music en te produisant comme DJ dans de nombreux clubs belges, dont le mythique Boccacio. Que peux-tu nous dire de l'atmosphère qui régnait durant cette période ? De l'extérieur, on a cette vision de clubs immenses et de foules hystériques dansant des nuits et des jours entiers sous ecstasy ?

Hou lala ! Que de neurones pétés durant cette période. Ce fut ma période la plus déjantée entre le studio et les platines à longueur de semaines. Je sortais beaucoup de disques à ce moment là sur les labels Mac Kenzie, Music Man, R&D, WafWaf, etc. J'ai travaillé avec des gens comme Sebastian S., Acid Kirk, Eric Beysens, Patrick Fasseau, Patrick DeGraeve, D-Jack, Deg...

Il faut savoir qu'à cette époque-là, moyennant un parcours de 400 kilomètres entre Anvers, Gand et Bruxelles, on pouvait trouver un club techno ouvert non stop du vendredi soir au mercredi matin en Belgique. C'était effectivement une aubaine pour un DJ producteur désireux de tester ses maquettes DAT sur le terrain. Par contre, je ne pense pas que la situation ait été très différente en Angleterre ou en Allemagne en ce qui concerne les drogues récréatives.
J'ai par la suite beaucoup voyagé pour effectuer mon set live/DJ dans les raves et clubs européens et américains. Et mon parcours de DJ s'est effectivement terminé au Boccacio, où j'ai été témoin de l'apogée de la scène techno belge en tant que résident jusqu'à l'arrêt brutal (par l'armée belge) des festivités technoïdes extrêmes. Ce coup de semonce (nécessaire) de la part des autorités allant de pair avec la reprise commerciale du mouvement, mes bacs de disques se sont retrouvés dans un placard.

Avec le recul, comment expliques-tu que la culture électronique ait eu un impact aussi important en Belgique, ce qui ne fut pas nécessairement le cas dans d'autres pays européens ?

Je pense qu'en Belgique les conditions sont réunies pour accueillir une scène alternative hétéroclite qui peut absorber les différentes tendances et produire un mélange des genres intéressant. Au vu de la taille et la situation géographique de notre pays, les belges semblent montrer une ouverture culturelle plus marquée que ses voisins. Pas d'exception culturelle belge à priori ! Ajoutez à cela une propension naturelle des belges au disjonctage collectif?

De plus, les distributeurs de disques en Belgique constituaient à l'époque une plaque tournante européennes pour les labels underground du monde entier toutes tendances confondues. Ce qui n'a pas manqué d'inspirer une belle brochette de geeks déjantés de mon genre.

Les personnes qui te connaissent ont eu l'occasion de noter ton obsession quasi fétichiste pour les gadgets électroniques et informatiques, auxquels tu consacres notamment Tech Tribes.ch, un blog d'information. D'où te vient cet amour immodéré pour les jouets technologiques ?

Demandez à un myope s'il ne voue pas un culte pour ses prothèses oculaires. Je considère la technologie comme un atèle qui nous aide à mieux imaginer, créer ou communiquer avec notre entourage. Je suis un fervent évangéliste technophile qui caresse le voeu pieu d'un monde meilleur grâce à l'avancée du savoir et de la technologie. Les japonais me fascinent par rapport à leur culture collective du progrès.

Nous devons en prendre de la graine. Je cultive en effet une curiosité positive irrépressible pour les outils de demain. C'est pour ça que le slogan de Techtribes.ch est "Enjoy the Future...!" Plus de cinq mille lecteurs par mois suivent les morceaux choisis de mon surf quotidien que je relate sur Techtribes. En fait, je partage mon bloc note personnel de veille technologique et mon intérêt pour les gadgets. Concepteur alpha / bêta et testeur fébrile, je suis néanmoins confronté quotidiennement à la frustration omniprésente occasionnée par la mécanique trop souvent erratique de tous ces gadgets.

Dans les années 90, tu as participé à l'aventure ArKaos, la société à l'origine du logiciel du même nom qui est une référence pour les vidéos jockeys du monde entier. Qu'est-ce qui a motivé la création de ce programme de traitement en temps réel de la vidéo et comment en êtes-vous arrivés à ce résultat ?

Echaudé par différents abus de confiance et les pratiques pourrissantes des maisons de disques avides de profits rapides (PIAS a fondu physiquement le back catalogue de nos deux labels R&D et WAF WAF), j'ai alors décidé de ne plus produire de "musique aveugle" et de me consacrer à ce que je considère encore aujourd'hui comme une inévitable évolution, à savoir la musique visuelle. Lors de mes sets live, j'ai été frappé par le fait que les gens s'arrêtaient de danser pour me regarder tripoter mes boutons (rien de très spectaculaire donc) et l'idée de synchroniser des images sur un écran derrière moi est devenue une évidence. Avec l'obsession de "voir" ce que j'entends et surtout d'être à même de créer mon clip simultanément avec mes compositions sans quitter mon séquenceur midi.

De fait, l'aventure ArKaos a commencé au Studio Sound Factory quand Thierry Beaucarne m'a présenté Marco Hinic, un ingénieur de ses amis. Les bases de l'interface utilisateur (le piano à images) ont été vite posées sur un Mac IIfx flambant neuf. Mais ce n'est par la suite qu'avec l'arrivée du PowerPC (6100/7100) et du format QuickTime que les choses ont commencé à se préciser. Je pense que nous avons été les premiers à cette époque à délivrer de la vidéo (Cinepak 320x240) en plein écran sur Mac ! Grâce au soutien de Tim Schaaf d'Apple et un deal de distribution mondiale avec Steinberg, nous avons pu constituer la société en nous servant de fonds publics d'amorçage. Avec l'aide de Wax (Frédéric Van Geluwe), j'ai dessiné la version flight case du logiciel que j'ai nommé Kaos Box. Ensuite, tout s'est emballé et je suis parti sur les routes avec mon nouvel instrument de musique vidéographique.

Le succès d'ArKaos t'a par la suite donné l'occasion de travailler avec des artistes aussi importants que Jean-Michel Jarre, David Bowie, Basement Jaxx ou Nine Inch Nails. De quelle nature étaient ces collaborations et comment se sont-elles passées ? Tu as certainement quelques anecdotes croustillantes à nous relater ?

La rencontre avec Jean-Michel Jarre a été déterminante pour le démarrage, la mise au point et le succès de la Kaos Box d'ArKaos. Il a été très indulgent au départ et a participé de facto à l'essor de la méthodologie VJ naissante. Le terme de "visual musician" que me prêtait Jean-Michel m'a tout de suite convenu. C'est justement durant la tournée Oxygène en Europe que j'ai fait la connaissance de Gary Westcott (star light designer) avec qui j'ai rebondi sur plusieurs designs de scène (notamment pour David Bowie). Il deviendra plus tard mon associé. Le succès rapide de notre méthodologie vient de ce que nous étions à même de produire de manière rapide et intuitive des visuels impressionnants avec des budgets défiant toute concurrence. La créativité et la spontanéité du temps réel ainsi qu'une patte graphique originale étaient également très attractives pour nos clients.

Pour les anecdotes croustillantes... Que dire !? Après les séances imposées de "flicker fist fucking subliminal" sur le morceau Fashion durant la tournée Earthling de Bowie et la gabegie de projections durant le méga concert de Jean-Michel Jarre au Champs de Mars le jour de la victoire des français à la coupe du monde... D'innombrables souvenirs et autant d'émotions indélébiles. Ensuite, trade shows, conférences, designs pour Zucchero, M-People, les Scorpions et de nouveau Front 242. Une cadence effrénée, suivie d'un gros coup de frein côté santé. J'ai ensuite négocié ma sortie d'ArKaos à cause des divergences profondes avec mes associés et leurs nouveaux investisseurs. Puis, c'est à l'aide du moteur temps réel révolutionnaire (feu Ignition) de Thomas Alsina (qui avait bossé chez ArKaos) que j'ai construit une nouvelle console pour créer les visuels de la tournée mondiale de Basement Jaxx (avec Richard Shipman), ainsi qu'un défilé de mode pour Yves Saint Laurent.

J'ai finalement décidé de créer Vusix, une nouvelle entreprise basée à Genève pour développer un nouvel outil permettant la gestion et la synchronisation de tous les éléments d'un show en réseau. Conçue pour l'automation intégrale d'un plateau de télévision, cette machine pour "WebJay" était vraiment très avant-gardiste eut égard au phénomène télévision sur Internet que l'on peut voir aujourd'hui. Malheureusement, pour de multiples raisons humaines et financières, Vusix n'a pas dépassé le stade du laboratoire expérimental.

En parlant de spectacles et d'oeuvres audiovisuelles, tu voues un intérêt particulier à Alexandre Scriabine, un compositeur russe proche des cercles théosophiques londoniens européens qui envisageait déjà au 19ème siècle un clavier à couleurs dont les dégradés accompagneraient les sons pour transcender ses auditeurs. Peux-tu nous parler de cet artiste et de son influence sur ton travail ?

Je m'intéresse à toutes les formes de la musique visuelle et ses phénomènes psycho visuels ainsi qu'aux mécanismes de perceptions intermodales.

Pour moi, le compositeur russe Alexandre Scriabine (1872-1915) a posé les bases de ce que devraient être les technologies de spectacle aujourd'hui. Conceptuellement, je dirais qu'il a été encore plus loin dans ses visions que toutes les techniques que nous utilisons à l'heure actuelle, en décrivant précisément une vision de l'extase collective telle qu'elle fut pratiquée par la suite par le mouvement psychédélique de la Beat Generation dans les 60's/70's jusqu'au concept actuel de la techno rave. Je considère Scriabine comme le "godfather" de tous les deejays et veejays réunis. Dans la lignée des poètes symbolistes, il a carrément ouvert les voies de l'art total en mettant au point son piano de lumière (Luce) qui allait de pair avec sa propre notation et sous la forme de poésie, la description des visuels associés alors qu'il ne disposait pas encore de moyens de projections (les frères lumière venaient juste de présenter leur premier cinématographe en 1895). Scriabine est mort en 1915, laissant derrière lui son ultime oeuvre apocalyptique inachevée (l'Acte préalable ou Mysterium (voir : http://www.deadmedia.org/notes/41/416.html).

« La musique est un art d'allégorie ; elle décrit un paysage par des sons, elle ne l'évoque jamais directement ; elle ne nomme rien, elle transpose toujours. Elle est le symbole parfait, et Hegel dirait qu'elle serait le langage métaphysique par excellence, si nous pouvions arriver à penser en sons aussi aisément qu'en mots. »
- Camille Mauclair, L'Art en silence, 1901.

Pour rebondir sur Scriabine, la synesthésie est aussi un concept important dans ton travail. Une de ses définitions dénichée sur Internet parle d'une association intermodale involontaire, soit la stimulation d'un sens perçue simultanément par un autre sens, sans que celui-ci ait été stimulé spécifiquement. Aurais-tu la bonté de nous éclairer plus avant ?

L'étymologie du mot synesthésie vient des mots grecs "syn" (ensemble) et "aisthetis" (perception) donc littéralement : perception simultanée. On retrouve des traces du syndrome neuropsychiatrique appelé synesthésie, il y a plus de 300 ans. Considérée comme une pathologie qui procure au patient atteint des "effets de bord" sensoriels, la synesthésie suscite par exemple la capacité d'entendre les couleurs, goûter les formes, sentir les sons, etc. Intuitivement, je pense qu'à des degrés très divers, nous sommes tous atteints de synesthésie. A mon sens, la sensation de plaisir est sous-jacente au concept de synesthésie. In extenso, la stimulation coordonnée de plusieurs sens peut provoquer des états modifiés de la conscience, mécanisme largement récupéré par un grand nombre de rituels religieux et autres créateurs de spectacles transcendant l'imaginaire collectif.

Pour ceux qui désirent cerner un peu plus les principes de la synesthésie, je conseille l'excellent ouvrage de Richard E. Cytowic, The Man Who Tasted Shapes (MIT Press).

De la synesthésie, on en arrive rapidement au Digital Circus. Peux-tu nous présenter ce projet et nous parler de la fondation que tu projettes de créer pour contribuer à son développement ?

Le Digital Circus est un projet que je nourris depuis plus de dix ans. Il est le résultat de brainstormings fertiles avec de nombreux experts, artistes, architectes ou ingénieurs rencontrés au fil des années. Il est donc particulièrement périlleux d'aborder le projet en quelques lignes. Le concept original (appelé Réactor à l'époque) proposait déjà une structure mobile dans laquelle se déroulait un show psycho-rave synaesthétique basé sur la synchronisation de :

- la musique électronique diffusée en mode « spatial »
- des moving lights
- des projections vidéo
- des performances live

Cette structure expérimentale dévoilait déjà les ingrédients de base du projet actuel. Le Reactor constituait une expérience quasi mystique de quatre heures autour d'un scénario / concert / voyage visuel truffé d'artefacts technologiques et de temps forts de type "live performance". Le principe a été récemment entièrement revisité pour aboutir à l'avant projet actuel de notre format D-Circus.

D-Circus est un savant mélange entre :

- un planétarium itinérant
- une pièce de théâtre interactif
- une salle de concert
- un show de cirque
- une attraction de type parc à thème
- une salle de cinéma immersif

Le but avoué est de plonger les spectateurs dans une expérience immersive hyper réelle unique au monde grâce à un métissage intelligent de toutes les formes de divertissement connues. Aujourd'hui, nous passons à l'action au vu :

- de la finalisation des spécifications du format D-Circus
- des développements spectaculaires récents dans le domaine des projections
- des capacités de calcul des machines graphiques combinées avec les
développements de nos propres logiciels
- de la récente invention de notre structure architecturale mobile
- de l'association avec les artistes du Cirque de Bruxelles

En vue d'assurer la pérennité du concept original, nous avons décidé de créer Digital Circus Foundation, une association à but non lucratif basée à Genève qui regroupe toutes les expertises ayant comme objectif de réaliser la nouvelle génération de formats de l'industrie du spectacle et du divertissement : le D-Circus.
Sous la forme d'un Open Lab, les recherches sont articulées sur la transversalité des disciplines et des métiers exercés par les membres de l'Association. Avec un ancrage profondément européen, nous envisageons d'initier, de syndiquer et de communiquer à nos membres le résultat d'études et de programmes de recherche émanant d'universités, de laboratoires et de sociétés privées en vue de mener le format D-Circus vers son exploitation. Le but de la Digital Circus Foundation est de fédérer les énergies et les moyens financiers des parties intéressées (partenaires industriels, sponsors, laboratoires de recherche, mécènes, artistes, etc.). Les activités de la Digital Circus Foundation sont centrées autour de trois grands pôles de recherche : Architecture - Technologie - Humain.

01. ARCHITECTURE

Cet avant-projet de la structure mobile D-Circus a été réalisé pour la Digital Circus Foundation par Francis Clerc et son équipe de FF Melange basée à Darmstadt. La contrainte de base était de réaliser une structure itinérante soutenant un écran de projection hémisphérique rétroactif éclairé par des seize projecteurs de cinéma digital. Le principe révolutionnaire breveté repose sur une différence de pression entre les deux couches que constituent l'écran de projection hémisphérique et la couche extérieure. Ce principe génial assure une rigidité globale à la structure ainsi que la forme parfaitement hémisphérique de l'écran. De plus, nous avons bouleversé tous les paradigmes de la scénographie moderne en établissant l'arrière-scène en dessous des spectateurs.

02. TECHNOLOGIE

L'utilisation des technologies de pointe est une composante essentielle dans les développements et le futur succès du format D-Circus. Aujourd'hui, les ingrédients de base de notre format ont été développés. De plus, le hardware est disponible dans le marché et ce, à des budgets enfin accessibles. Le défi principal réside dans l'imbrication d'un grand nombre de disciplines et métiers notamment dans :

02-1. Les technologies de média numériques

a. Cinéma Digital et Traitement temps réel de l'image numérique

Grâce à une longue collaboration avec le software guru Dan Tatut et son équipe de Chrome Imaging basée à Genève, nous avons développé l'architecture et les fondations d'un système de compositing et d'effet spéciaux de cinéma immersif 2D/3D temps réel en vue de réaliser le record du monde de la plus haute résolution d'un écran de cinéma hémisphérique.

b. Techniques de spatialisation de son

Nous envisageons de finaliser nos algorithmes de spatialisation du son ainsi que l'élaboration de l'acoustique autour d'un système de sonorisation propriétaire.

c. Techniques de projection

Avec l'aide de notre partenaire spécialisé en technologies de projecteurs, le système de projection haute définition proposera une puissance lumineuse de plus de 160'000 lumens.

02-2. Les technologies de Contrôle de show

Durant toutes ces années, j'ai travaillé sur les fondations d'un système de management de flux de contrôle universel permettant :

a. Le synchronisme des éléments de perception

La spatialisation de la lumière, du son, des images, des fragrances et autres éléments scénographiques est élaborée et déclenchée par un contrôleur unique. Ce contrôleur unique permet d'explorer mais surtout de systématiser le déclenchement des émotions synesthétiques.

b. L'interactivité du public

Le public devient un acteur à part entière du spectacle. L'image, la position et le choix de chaque spectateur peut être analysé en temps réel et permet des interactions simultanées inédites sur l'écran de projection.

3. HUMAIN

D-Circus est avant tout une aventure humaine centrée sur une volonté collective d'explorer de nouvelles dimensions dans l'expression des émotions universelles. Dans Humain, nous entendons le conteur, le danseur, le magicien, le tragédien, le musicien, le poète, l'enchanteur, le dompteur, le jongleur, l'acrobate, le clown...D-Circus est aussi un dôme pour le film fantastique, Le Cirque de Bruxelles et son génial mentor Didier Bouillon explorent déjà depuis longtemps les composantes du cirque moderne. Leur spectacle Dream World précise déjà leur goût pour l'avant-garde et la volonté d'une esthétique nouvelle. Des costumes lumineux, des chorégraphies dantesques, des numéros aériens époustouflants expliquent le choix naturel de la Digital Circus Foundation pour le cirque de Bruxelles comme partenaire artistique. Les acteurs du D-Circus participent à la notion d'hyper virtualité dans un ballet fantasmagorique exclusif. La recherche dans les systèmes de pyrotechnie est aussi un ingrédient de base du format D-Circus.

Qu'est-ce qui motive ton intérêt pour le cirque, une forme de divertissement séculaire. Est-ce que tu perçois comme un besoin de revenir vers des échanges plus humains et plus directs dans un monde gagné par la virtualité et les télécommunications ?

L'émerveillement du public du cirque occasionné par la virtuosité et l'aura émotionnelle de leurs semblables est en effet séculaire. Le défi perpétuel des lois de l'apesanteur voire de l'espace-temps constitue un élément cultuel important dans le paradigme du cirque. Depuis 3500 ans, les spectacles de cirque nous ont permis d'appréhender les clefs de notre propre cosmogonie. Comme décrit précédemment, l'humain est un des pôles de développement essentiels dans les développements de la Digital Circus Foundation. Tout commence par une histoire, un scénario fantastique, une allégorie de la magie que seul l'alchimie humaine est en mesure de créer. Une des particularités du format D-Circus est l'omniprésence de la performance théâtrale, de la danse et de performances effectuées par des artistes bien vivants.
C'est un contre balancier nécessaire à la profusion d'effets spéciaux et à la présence sur l'écran d'humanoïdes/avatars à priori dénués de tout Adn vivant. L'expérience de se faire surprendre par l'homologue vivant d'un avatar/acteur du film me semble très intéressante. La réalité virtuelle est intéressante si elle est traitée de manière à la rendre plausible; c'est la condition sine qua non de déclenchement du rêve par l'hyper virtualité. C'est un phénomène abondamment abordé par les auteurs de science fiction.

Brian Eno disait dans son journal de bord de l'année 1995 que les ordinateurs n'ont pas assez d'Afrique en eux. Est-ce que tu adhères à ce point de vue, à l'idée qu'il manque une dimension peut-être plus charnelle à la micro-informatique actuelle ? Ton travail sur les interfaces utilisateurs des consoles de mixage vidéo me semble aller dans ce sens.

En effet, je porte une grande importance sur les interfaces cognitives entre l'Homme et sa machine, et plus particulièrement dans le processus de création. La loi de Moore ne s'est certainement pas appliquée à la simplicité d'utilisation des machines, bien au contraire. L'ergonomie et la versatilité d'un Amiga des années 80 n'avaient rien à envier aux machines actuelles.

Personnellement, je suis frappé que l'industrie informatique soit restée bloquée sur le modèle du pointeur unique (la souris), alors que nous possédons une multitude de moyens alternatifs d'interagir avec notre environnement. L'idée de piano à image d'ArKaos allait dans le bon sens. Le fait d'oublier l'ordinateur pour se consacrer à la virtuosité sur son instrument me semble crucial. Nous avons étudié beaucoup de pistes dans l'amélioration de l'ergonomie dans le cadre de la création artistique assistée par ordinateur dans notre laboratoire de feu Vusix. Des initiatives de recherche comme le programme Affective Computing du MIT sont des pistes intéressantes et plausibles qui vont dans le sens d'une évolution technologique plus consensuelle.

Parmi les grands débats récurrents dans La Spirale, il y a la question de l'influence des nouvelles technologies et plus particulièrement celles liées à l'information. La multiplication des canaux de diffusion donne déjà le vertige. Comment vois-tu l'évolution de l'industrie du divertissement et son influence sur notre quotidien dans les années à venir ?

Nous sommes passés en quelques années à une industrialisation spectaculaire et systématique de toutes les formes de divertissement, à travers laquelle les critères financiers ont tendance à prendre l'avantage sur la finalité esthétique de l'Oeuvre. L'ubiquité des médias et de la Communication nous inonde d'informations. Mais il nous manque encore des outils de filtre et de personnalisation. Le monde du tout digital nous a plongé dans un certain mutisme individualiste et paranoïaque. La création preset / kleenex / copier coller / relègue les vrais artisans dans la caste des rêveurs utopistes. Les grandes utopies ne font plus recette et sont donc à priori dénuées d'intérêt. La surenchère dans les budgets de productions hollywoodiens donne le vertige. On a peut être trop tendance à jauger le succès potentiel d'un film par l'énormité de son budget. L'outrecuidance manifeste des majors a déjà commencé à produire certains effets pervers.

Globalement, je reste quand même positif car je pense que le public n'est pas aussi stupide qu'il ne le laisse penser. Le phénomène de la contre-culture porté par la diversification des canaux de diffusion va lentement produire un impact bénéfique sur l'ouverture du public. Aussi, je suis persuadé qu'il y a une place de choix pour des concepts innovants comme le D-Circus en tant que synthèse alternative des formats de divertissement émergents, offrant du même coup une nouvelle palette d'outils pour la création et la communication.


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A propos de cet article


Titre : JEAN-CHARLES TRAMASURE « DIGITAL CIRCUS »
Auteur(s) :
Genre : Interview
Copyrights : La Spirale.org - 1996-2008
Date de mise en ligne :

Présentation

Jean-Charles Tramasure - Une interview tirée des archives de La Spirale.

A propos de La Spirale : Née au début des années 90 de la découverte de la vague techno-industrielle et du mouvement cyberpunk, une mouvance qui associait déjà les technologies de pointe aux contre-cultures les plus déjantées, cette lettre d'information tirée à 3000 exemplaires, était distribuée gratuitement à travers un réseau de lieux alternatifs francophones. Sa transposition sur le Web s'est faite en 1995 et le site n'a depuis lors cessé de se développer pour réunir plusieurs centaines de pages d'articles, d'interviews et d'expositions consacrées à tout ce qui sévit du côté obscur de la culture populaire contemporaine: guérilla médiatique, art numérique, piratage informatique, cinéma indépendant, littérature fantastique et de science-fiction, photographie fétichiste, musiques électroniques, modifications corporelles et autres conspirations extra-terrestres.

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