OTOMO - CABARET ROUGE
Enregistrement : 19/11/2010
Mise en ligne : 19/11/2010
Une célébration polymorphe, annoncée comme une gigantesque sculpture vivante et délurée, glamour, excentrique et fantasque, soutenue par une programmation impressionnante qui ne manquera pas d'éveiller des souvenirs chez les aficionados de La Spirale : Materia Prima, Dead Sexy Inc., Mimetic, Lukas Zpira, Satomi Zpira, sans oublier Phil Von, Jad Wio, Tess Wassila, Miss Ficel et des dizaines d'autres artistes, musiciens et performeurs en tous genres.
Propos recueillis par Laurent Courau
En fait le nom Cabaret Rouge est celui d'un des espaces de notre lieu le T.O.T.E.M. C'est celui que nous avons investi en premier, en 2000. On y organisait tout un tas d'événements, des performances, des concerts, des soirées littéraires, des soirées expérimentales, de la poésie, des expos.
La particularité c'est qu'à cette époque le lieu n'était pas aux normes, si bien que tout ce faisait dans la plus grande clandestinité. Le bar, les soirées, notre présence, tout était clandestin. Les infos circulaient de bouches à oreilles et on a fidélisé tout un public qui adorait venir dans cette espace qui apparaissait comme privilégié. Une sorte d'île, d'enclave, où les choses se vivaient en fin de semaine en dehors de toutes les convenances et des codes de l'intelligentia culturelle. C'était magique avec une sorte de d'innocence teinté de décadence. Comme ce sentiment qui devait habiter l'entre-deux guerre. Comme si quelques chose allait se passer.
Je crois que ce qui s'est passé, c'est le 11 septembre et l'entrée fulgurante dans le XXIe siècle. On a continué comme ça dans la clandestinité jusqu'en 2004, date de la mise au norme de certains espaces, date où les choses se sont faites alors au grand jour. Cabaret Rouge collait bien. Le rouge de la sensualité mais aussi le rouge du sang. Le rouge des passions aussi, dans une société qui cherche à nous endormir avec des yaourts bio et nous empêcher de fumer, d'écouter de la musique fort et de boire, de nous empêcher de baiser en nous vendant de la baise à tous les coins de rue, c'était pas mal.
Une niche de résistance festive en somme, remplie de désirs en plein coeur de l'empire des mort-vivants qui nous entourent. Ces spectres agités et rendus fous qui lentement dévorent le monde. Alors le Cabaret Rouge c'est un Cabaret, un bordel, une fête foraine, un carnaval, un repaire de vampire, de freaks, d'hermaphrodites et de catins. Un cirque. Un endroit où on se sent entre gens de bonne compagnie, en sécurité et ou on peut s'amuser dans un grand bal moderne. Séduire et se faire séduire.
Quel grain de folie vous a poussé à quitter la quiétude de votre repaire nancéen pour vous lancer dans cette nouvelle aventure parisienne ?
C'est une bonne question. On est si bien dans notre vaste demeure, surtout en ce moment que les feuilles sont tombées des arbres et que les basses lumières de l'automne confèrent une aura de mystère et d'alchimie à tout le site. Alors, disons peut-être parce que Paris se persuade toujours qu'en province il ne se passe rien, donc on s'est dit allons faire un petit coucou.
Évidement on ne pouvait pas venir avec notre navire, nos salles immenses, nos caves, notre ferraille, nos parquets, nos tentures. Alors on va venir avec l'esprit des lieux et celui notre travail pour le partager à Paris dans un endroit qui nous ressemble un peu. La Machine du Moulin Rouge était ce qui se rapprochait le plus avec ces espaces, ces couloirs, ces recoins. On s'est dit çà s'est bien, on y va. Alors nous voilà.
Le programme est riche et complet. Le flyer nous annonce des performances, une electro party, du crazy cancan et du cyber foxtrot, un carnaval fétichiste et une parade de freaks, sans oublier une mystérieuse lyricon pravda. Aurais-tu la bonté de nous toucher quelques mots de votre atypique programmation ?
La programmation nous ressemble, protéiforme et multiple. Une nébuleuse de genres et de cultures, de personnes venus d'horizons différents. Une programmation dense et généreuse qui réunit des personnes qu'on aime beaucoup. Une programmation qui invite aussi à découvrir certains activistes de l'est de la France. Une programmation troublionne et décomplexée qui ne se prend pas trop au sérieux en cherchant à faire exploser les niches culturelles.
Je suis persuadé qu'il est magnifique de voir un gothique frappé le sol avec sa New Rock sur un beat de Parliament ou de Funkadelic, de voir un activiste électro découvrir avec bonheur un vieux D.A.F ou un vieux Nitzer Ebb. La chose extraordinaire c'est que la question du dress-code en tant que code d'appartenance, fetish, affirmation de soi et désinhibiteur social a touché toutes les cultures de la disco, au punk, de la funk au cyberpunk, de la cold wave au cosplay. C'est une passation culturelle et urbaine incroyable, une passion commune pour le merveilleux, le rêve et la sensualité. Une amour futile du paraître pour mieux être. La mode des fourches codines.
C'est ça la Lyricon Pravda, cette vérité lyrique, une poésie du patchwork, du cut-pp identitaire. Encore le bordel, encore le chaos mais joyeux. Pour autant la vérité Lyrique c'est aussi le stupéfiant mélange des genre qui fait le monde dans lequel nous vivons, inquiétant, monstrueux. Je n'en dis pas plus, il faut venir voir. Quoi qu'il en soit, tout cela est un amuse bouche affin d'essayer de donner envie à certain de ce jeter dans un TGV en septembre prochain, pour vivre pendant une semaine le festival Souterrain Porte VI. La même chose en très, très grand, chez nous dans de nombreux espaces, avec des artistes venus des quatre coins du monde, des propositions plus qu'improbables et de nombreuses choses à découvrir.
Que peut-on souhaiter à Cabaret Rouge, à quelques heures de l'ouverture des portes ?
Que le monde se presse en masse et que nous passions tous ensemble la soirée la plus dingue de l'année. What else?
Commentaires
Vous devez vous connecter ou devenir membre de La Spirale pour laisser un commentaire sur cet article.