GRAHAM DANIELS & NICK CLARKE « ADDICTIVE TELEVISION »


Enregistrement : Archives de La Spirale (1996-2008)

Société de production, label audiovisuel, regroupement de Vjs... Addictive Television sévit sur les chaînes de télévision anglaises, les réseaux à haut débit et dans la scène musicale électronique depuis 1992.

Leurs productions fusionnent la vidéo, les images numériques et la musique électronique pour créer un nouveau type de divertissement radicalement différent de ce qui existe déjà sur nos écrans de télévision.

La Spirale a rencontré Graham Daniels, co-fondateur d'Addictive Television avec Nick Clarke.


Propos recueillis par Laurent Courau.



Racontez-nous l'histoire d'Addictive Tv ? Et que faisiez-vous auparavant ?

Nous avons commencé il y a une dizaine d'années avec une série d'émissions de cinq minutes programmée tard le soir et consacrée aux gens qui vivent la nuit. Cette émission est depuis devenue culte chez les étudiants et plusieurs centaines d'épisodes ont été réalisés au fil des années. Avant Addictive Television, je travaillais comme assistant de production et Nick Clarke était caméraman.

Parlez-nous des activités de la structure...

Addictive Tv a deux facettes. D'un côté celle de la société de production de programmes télévisuels, et de l'autre celle du VJing et des visuels dans les clubs. Les deux se rencontrent de temps à autre à l'occasion de projets comme les séries Transambient pour Channel 4 et Spaced Out sur Sci-Fi Channel. Notre petit noyau de cinq personnes s'élargit avec des indépendants en fonction de nos besoins. Pour ce qui est de la production, nos clients principaux sont ITV (la principale chaîne commerciale anglaise), British Telecom, Channel 4, The Sci-Fi Channel, LWT et Gameplay.com. Pour la partie visuelle, nous sommes résidents au Turnmill et nous organisons tous les mois, en collaboration avec Cinefeel (association basée à Londres et Paris et responsable de nombreuses soirées au Batofar, à Beaubourg, etc.), une nuit audiovisuelle au Below 54. Nous avons travaillé pour de nombreuses structures dont Wella Shockwaves à l'occasion du festival V2000, le Ministry of Sound, The End, le New World Music ou le festival Rezolutions à Strasbourg.

Comment en êtes-vous venus au Vjing ?

Très simplement. Un VJ qu'on m'avait présenté m'a invité à créer mes propres visuels et à venir mixer avec lui un soir. Ca m'a plu et j'ai continué à mixer régulièrement. C'est par la suite ma rencontre avec Stan Mytkowski, le Vj du Ministry of Sound qui m'a décidé à me lancer sérieusement. Il m'a demandé de venir au Ministry of Sound après avoir vu mon travail. Et comme on dit, le reste fait partie de l'histoire.

Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne le Vjing ? Est-ce que vous travaillez avec des bandes pré-enregistrées et prè-montées ? Et quel type de matériel utilisez-vous pour jouer en live ?

C'est un peu un mélange de tout ça. Je me sers principalement de cassettes près-montées avec un système de quatre lecteurs vidéo et une table de montage (habituellement une MX50), bien qu'il me soit arrivé de travailler sur Pc avec des logiciels dédiés comme Vjamm (Ndlr. logiciel de mixage vidéo en temps réel pour les VJs édité par le label Ninja Tune) ou en utilisant des programmes de montage vidéo comme Premiere (Ndlr. logiciel de montage vidéo sur Mac et Pc édité par la société Adobe, également à l'origine de standards de l'industrie graphique tels que Photoshop, Illustrator ou After Effects) .

Comment travaillez-vous sur vos images ? Est-ce que vous utilisez l'informatique pour les retoucher et les transformer ?

C'est encore une fois un mélange de tout ça. Je préfère conserver la plupart de mes images sous leur forme originale, éventuellement les couper pour faire des boucles, les salir ou les étirer dans le temps mais qu'elles gardent leur aspect original. Encore une fois je n'utilise pas beaucoup d'effets lorsque je joue en live. Le plus important se passe au niveau du rythme, du choix des images et de la relation avec ce que joue le Dj. Je ne déforme pas réellement mes images. Bien que nous travaillons, Nick et moi, sur des images abstraites que nous filmons nous-mêmes, nous faisons la majeure partie du travail au moment du tournage. Notre travail n'est donc pas vraiment basé sur les images informatiques.

D'où tirez-vous votre inspiration et quels sont les artistes ou les réalisateurs dont vous vous sentez proches aujourd'hui ?

Je m'inspire du monde qui m'entoure, de la vraie vie. Il y a tellement de choses merveilleuses à voir. Tout tient à l'attention que vous portez à ce qui vous entoure. Ce serait aussi juste de dire que les personnes avec lesquelles je travaille m'inspirent – particulièrement Paul Hithersay (un VJ anglais) et Brain McClave – un artiste numérique résident de l'University For Industry qui a récemment réalisé une vidéo stéréoscopique 3D sur le développement de la pensée humaine.

Vous considérez-vous comme un artiste, et qu'est-ce qui fait à vos yeux la différence entre un artiste et un artisan ?

Bonne question. Les facultés techniques sont à mon avis aussi importantes que les visions artistiques, particulièrement dans le cas d'un Vj. Je pense que les gens qu'on considère comme des artistes sont très souvent d'excellents techniciens. Vous devez atteindre un certain niveau de compétences techniques avant de pouvoir réaliser et mettre en scène vos visions artistiques, qu'il s'agisse de peinture, de danse, de sculpture, de musique, de Dj ou en effet de Vj. «Artiste» n'est peut-être pas le terme que j'emploierais dans mon cas. Tant mieux si certains le pensent mais je me considère plus comme faisant du divertissement visuel.

Vous êtes très impliqué dans la scène électronique. Avec quels artistes avez-vous eu l'occasion de travailler ? Avez-vous des projets de vidéoclips ?

En tant que Vj, vous collaborez plus avec sa performance qu'avec le Dj en personne. Mes derniers bons gigs eurent lieu avec Derrick May, Carl Craig et Fatboy Slim au Glastonbury Festival. Pour ce qui est de la production d'albums audiovisuels, nous avons travaillé avec des artistes comme Coldcut ou 808 State. Pour Spaced Out, notre dernier projet, nous avons collaboré avec Quantic – un jeune Dj fantastique qui vient de signer pour un premier album avec le label Truethoughts. Je n'ai pas encore de projets de réalisations de vidéoclips mais si ça doit arriver...

Parlez-nous de votre label visuel... Comment vous est venue cette idée ?

Cette idée nous est venue il y a quelques années alors que nous commencions à travailler sur la série Tv Transambient. Le format Dvd commençait à prendre et nous en avons simplement perçu le potentiel. Venant du milieu de la production Tv, l'immense majorité des programmes existants et des vidéos musicales nous ennuyait. Sachant à quel point le travail d'un Vj peut amener une nouvelle dimension au mix d'un Dj, il nous a paru logique et intéressant de transposer cette expérience sur un support enregistré. De fusionner le film, les visuels et la musique pour en tirer quelque chose qu'on pourrait jouer et rejouer de la même manière qu'on écoute des disques. Nous voulions créer un nouveau divertissement, quelque chose de radicalement différent de ce qui existe déjà sur nos écrans de télévision. Et ce que nous faisons reste vraiment nouveau. Tout le monde ne comprend pas, particulièrement dans l'industrie musicale ! Nous sommes distribués en Angleterre mais sommes toujours à la recherche de distributeurs dans des pays comme la France ou l'Allemagne !

Parlez-nous de Transambient et de Spaced Out, les séries tv que vous produisez pour Channel 4 et Sci-Fi Channel... Comment avez-vous fait pour vendre des programmes aussi originaux aux chaînes de télévision ?

Il n'est effectivement pas facile de vendre ce genre de programme aux chaînes de télévision. La télévision reste un média extrêmement conservateur. Transambient fut conçu comme un «after» audiovisuel que les gens regarderaient en rentrant de club. Comme si on téléportait l'expérience d'un «chill out» dans votre appartement au milieu de la nuit. Spaced Out fut commandé par Sci-Fi Channel pour être utilisé comme de courts mixes audiovisuels funkys à insérer entre les émissions.

Comment voyez-vous l'évolution des médias visuels... télévision, cinéma, etc ?

Ce serait trop long de répondre par écrit ici ! Bien que j'imagine qu'il y aura de plus en plus de programmes de ce genre dans le futur... Surtout lorsque nous bénéficierons de connexions à Internet rapides et fiables. La baisse des coûts de production qu'entraîne le numérique ne peut qu'amener des changements dans le monde du cinéma et de la télévision. Nous utilisons aussi des trames narratives non linéaires dans notre travail, quelque chose qui est enfoui assez profondément. Et je sens justement qu'il y aura de plus en plus d'oeuvres de ce type au cinéma et à la télévision. A ce propos, avez-vous vu Timecode, le film de Mike Figgis ?

Quand aurons-nous le plaisir de voir vos créations en France ?

Nous sommes toujours à la recherche d'un distributeur pour nos Dvds en France. D'ailleurs, si jamais quelqu'un lit ça... Pour ce qui est des projections, notre travail est passé dans plusieurs festivals, au Centre Georges Pompidou et à la Cité des Sciences. Nous avons également participé à plusieurs soirées organisées par Cinefeel dans des bars comme le Popin à Paris ou la Main d'oeuvre à Saint Ouen. J'ai aussi joué en tant que Vj au Batofar et au festival Resolutions 2000 à Strasbourg.

Quels vos projets dans le futur proche ? De nouveaux Dvds, de nouvelles séries de télévision ?

Nous produisons en ce moment The Web Review, une nouvelle série télé qui chronique les sites Internet et nous terminons actuellement la production de Spaced Out, un album audiovisuel qui compile le travail que nous avons réalisé pour Sci-Fi Channel. Ce nouveau Dvd sortira en Angleterre en mai 2001.


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Titre : GRAHAM DANIELS & NICK CLARKE « ADDICTIVE TELEVISION »
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Genre : Interview
Copyrights : La Spirale.org - 1996-2008
Date de mise en ligne :

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Addictive Television - Une interview tirée des archives de La Spirale.

A propos de La Spirale : Née au début des années 90 de la découverte de la vague techno-industrielle et du mouvement cyberpunk, une mouvance qui associait déjà les technologies de pointe aux contre-cultures les plus déjantées, cette lettre d'information tirée à 3000 exemplaires, était distribuée gratuitement à travers un réseau de lieux alternatifs francophones. Sa transposition sur le Web s'est faite en 1995 et le site n'a depuis lors cessé de se développer pour réunir plusieurs centaines de pages d'articles, d'interviews et d'expositions consacrées à tout ce qui sévit du côté obscur de la culture populaire contemporaine: guérilla médiatique, art numérique, piratage informatique, cinéma indépendant, littérature fantastique et de science-fiction, photographie fétichiste, musiques électroniques, modifications corporelles et autres conspirations extra-terrestres.

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